Edifact: l'ancêtre de la facture électronique

Edifact: l'ancêtre de la facture électronique

 21 07 2025  |   Facture

Voici un article dont le positionnement aurait tout aussi bien pu figurer dans la rubrique "archéologie" ou "secrets d'histoire", tant il convoque des références à des technologies dont la jeunesse actuelle ignore parfois jusqu'à l'existence. Inspiré de manière assumée par le dossier Grand Théma CIO publié dans Le Monde Informatique, cet article aborde les enjeux concrets de la facturation électronique, en s'appuyant notamment sur le témoignage de M. Guillaume Siccat, directeur de programme finance, transformation digitale et développement durable chez Opmobility, équipementier automobile mondialement reconnu.

Au détour de son intervention, ce dernier évoque une difficulté majeure rencontrée par son groupe : le choix de la Plateforme de Dématérialisation Partenaire (PDP) dans le cadre de la réforme française sur la facturation électronique. Selon ses propos, il leur faudra recourir à une seconde PDP, simplement pour ne pas remettre en cause leur système EDIFACT existant.

C'est précisément ici que certains lecteurs, notamment les moins de 30 ans, pourraient s'interroger : mais au juste, qu'est-ce donc que ce fameux EDIFACT, qu'on croirait tout droit sorti des archives de l'informatique préhistorique ?

Qu'est ce que Edifact ?

EDIFACT, acronyme de Electronic Data Interchange for Administration, Commerce and Transport, est un standard international d'échange électronique de données administratives et commerciales, élaboré dès les années 1980 sous l'égide des Nations Unies.

À l'époque où l'internet grand public n'existait pas et où l'informatique se limitait aux grandes entreprises industrielles, EDIFACT constituait une avancée remarquable, permettant aux multinationales et aux chaînes logistiques mondiales d'échanger automatiquement des données de manière structurée, sans papier. Ce standard, solide et éprouvé, s'est ainsi imposé dans des secteurs clés tels que l'automobile, l'aéronautique, la grande distribution ou encore la logistique internationale.

Cependant, les décennies ont passé, et les besoins en matière de facturation électronique se sont considérablement élargis, notamment avec l'émergence massive des PME, micro-entrepreneurs et professions libérales sur les marchés européens.

À ce titre, EDIFACT, s'il reste incontournable pour des flux industriels complexes, montre rapidement ses limites dès qu'il s'agit de rendre la dématérialisation accessible à tous. Le langage EDIFACT, extrêmement compact et technique, est difficilement lisible pour un non-initié, et sa mise en œuvre repose le plus souvent sur des infrastructures coûteuses, des spécialistes chevronnés et des solutions EDI (Échange de Données Informatisé) lourdes à déployer.

Edifact vs Factur-X : Retour vers le futur ?

Pour s'en convaincre, il suffit d'observer un extrait type d'un message EDIFACT :

UNH+1+INVOIC:D:96A:UN:1.1'
BGM+380+INV202406+9'
DTM+137:20240630:102'
RFF+ON:CMD456789'
NAD+BY+123456789::16'
NAD+SE+987654321::16'
LIN+1++ABC123:EN'
QTY+47:10'
MOA+203:150.00'
UNS+S'
MOA+39:150.00'
UNT+10+1'

Pour qui n'a pas grandi dans les salles machines des années 80 ou 90, ces lignes de code ressemblent davantage à un message crypté qu'à une facture. Certes, un simple éditeur de texte suffit pour générer ce fichier, mais encore faut-il disposer du décodeur humain : l'ingénieur EDI spécialisé et souvent coûteux.

Face à cette complexité héritée du passé, la réforme française de la facturation électronique a misé sur un standard plus moderne, plus universel et surtout plus lisible : le Factur-X.

Ce format hybride associe dans un même fichier un PDF classique, donc visuellement accessible par n'importe quel utilisateur, et un fichier XML structuré, destiné aux systèmes automatisés de traitement et de contrôle.

Voici à titre de comparaison l'équivalent, en Factur-X minimal, du message EDIFACT présenté plus haut :

<rsm:CrossIndustryInvoice xmlns:rsm="urn:factur-x:minimum:1p0" xmlns:ram="urn:un:unece:uncefact:data:standard:ReusableAggregateBusinessInformationEntity:100" xmlns:udt="urn:un:unece:uncefact:data:standard:UnqualifiedDataType:100">
  <rsm:ExchangedDocument>
    <ram:ID>INV202406</ram:ID>
    <ram:TypeCode>380</ram:TypeCode>
    <ram:IssueDateTime>
      <udt:DateTimeString format="102">20240630</udt:DateTimeString>
    </ram:IssueDateTime>
  </rsm:ExchangedDocument>
  <rsm:SupplyChainTradeTransaction>
    <ram:ApplicableSupplyChainTradeAgreement>
      <ram:SellerTradeParty>
        <ram:Name>Mon Entreprise</ram:Name>
        <ram:ID>987654321</ram:ID>
      </ram:SellerTradeParty>
      <ram:BuyerTradeParty>
        <ram:Name>Client SARL</ram:Name>
        <ram:ID>123456789</ram:ID>
      </ram:BuyerTradeParty>
    </ram:ApplicableSupplyChainTradeAgreement>
    <ram:IncludedSupplyChainTradeLineItem>
      <ram:AssociatedDocumentLineDocument>
        <ram:LineID>1</ram:LineID>
      </ram:AssociatedDocumentLineDocument>
      <ram:SpecifiedTradeProduct>
        <ram:Name>Article ABC123</ram:Name>
      </ram:SpecifiedTradeProduct>
      <ram:SpecifiedLineTradeAgreement>
        <ram:GrossPriceProductTradePrice>
          <ram:ChargeAmount>15.00</ram:ChargeAmount>
        </ram:GrossPriceProductTradePrice>
      </ram:SpecifiedLineTradeAgreement>
      <ram:SpecifiedLineTradeDelivery>
        <ram:BilledQuantity unitCode="C62">10</ram:BilledQuantity>
      </ram:SpecifiedLineTradeDelivery>
      <ram:SpecifiedLineTradeSettlement>
        <ram:SpecifiedTradeSettlementLineMonetarySummation>
          <ram:LineTotalAmount>150.00</ram:LineTotalAmount>
        </ram:SpecifiedTradeSettlementLineMonetarySummation>
      </ram:SpecifiedLineTradeSettlement>
    </ram:IncludedSupplyChainTradeLineItem>
  </rsm:SupplyChainTradeTransaction>
  <rsm:SupplyChainTradeSettlement>
    <ram:MonetarySummation>
      <ram:LineTotalAmount>150.00</ram:LineTotalAmount>
      <ram:GrandTotalAmount>150.00</ram:GrandTotalAmount>
    </ram:MonetarySummation>
  </rsm:SupplyChainTradeSettlement>
</rsm:CrossIndustryInvoice>

S'il paraît plus long, ce format présente un avantage fondamental : il est à la fois compréhensible par une machine et par un utilisateur humain. Les libellés sont explicites, les structures normalisées mais accessibles, et la production de tels fichiers est réalisable avec des outils simples, souvent gratuits ou inclus dans les suites bureautiques. De plus, le PDF intégré permet de conserver la présentation visuelle de la facture, ce qui rassure les clients peu technophiles.

Ainsi, la réforme française, qui impose progressivement l'émission et la réception de factures électroniques d'ici à 2027 pour l'ensemble des entreprises, s'inscrit dans cette volonté de démocratiser et de simplifier la dématérialisation. Si des grands groupes comme Opmobility doivent composer avec leurs systèmes historiques tels qu'EDIFACT, les TPE, PME et micro-entrepreneurs peuvent quant à eux s'appuyer directement sur des solutions Factur-X adaptées à leur niveau, sans surcoût démesuré.

Conclusion

En définitive, la vraie modernité ne réside pas simplement dans la technologie, mais dans sa capacité à être comprise et utilisée par tous, sans complexité excessive ni investissements inaccessibles. EDIFACT, solide mais figé, incarne le passé ; Factur-X, lisible et modulaire, prépare l'avenir.


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